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Oulan-Oudé le 28 octobre 2007 |
Chez les vieux croyants |
Atelier musique à Tarbagataï |
Coucou à l'école St Exupery |
La rencontre du 14 octobre dernier à Tarbagataï avec la communauté des Vieux-Croyants (tous croyants, pas tous vieux, descendants des russes orthodoxes expatriés en Sibérie après la réforme de cette religion qui entraîna le schisme de 1652 ) s’est déroulée de façon assez officielle puisque c’est Victor (travaillant à la section de « théâtre et arts de la scène » à l’Académie) qui nous a introduit auprès des responsables du centre culturel où se déroulaient les manifestations. |
Le plus grand lac du monde |
A 50 m du lac Baïkal |
Début de la glaçiation |
Quelques jours plus tard, Anatoli et Oleg nous entraînent cette fois-ci au bord du lac Baïkal, à Soukhaya, petit village situé à trois heures de route environ au nord d’Oulan-Oudé, l’endroit où nous aurions dû installer notre yourte l’été dernier si le ministre de la culture de Bouriatie s’était penché d’un peu plus près sur nos visas avant de partir en vacances…peut-être au bord du lac Baïkal aussi d’ailleurs ? Et même si le vent siffle ce jour-là un air bien maussade et glacé à nos oreilles, tout nous donne envie de revenir se perdre ici un jour. Salle pleine et chaleureuse lors du spectacle ; toujours une visite dans l’inévitable « musée » du village (photos de pêcheurs, brodequins de cuir, barattes et meules à grain, un gramophone, la maquette en bois d’une isba, la longue et triste liste des victimes de 41-45) ; et l’incontournable bibliothèque, sorte d’annexe du musée, à moins que ce ne soit l’inverse…au milieu des livres de tous âges, traîne là aussi la mémoire des lieux, en vrac, à remettre en état, un jour peut-être ; si bien qu’on s’amuse bien plus ici à découvrir les « trésors du capitaine » que dans des musées où les bonnes étiquettes sont en face des bons tableaux. Nous dormons chez Nenamtsia et Guenadine, un couple de paysans aux petits soins avec nous ; Nenamtsia nous offre d’abord de la soupe aux pommes de terre et sterlet, du poisson cru , des tomates et du pain noir ; notre chambre c’est une pièce avec trois lits, un énorme poêle central à briques réfractaires que Nenamtsia viendra elle-même fermer le soir et vérifier l’absence d’émanations de carbone ; sur le feu, la réserve d’eau, la théière et accroché au mur le petit lavabo, modèle de robinetterie unique, moitié fer-blanc, moitié bouleau. Le lendemain matin, le camion a eu un peu froid dans la cour mais pas nous ! Tandis que le vent continue de souffler, Anatoli et Oleg nous emmènent goûter aux bains (de nombreuses sources d’eau chaude affleurent autour du lac) dans le campement d’été, vide en ce moment. Le bâtiment n’est pas chauffé mais le bassin est très chaud et très grand ; entièrement pour nous ! On ne reste pas plus d’un quart d’heure, puis on file boire un thé chez Kim, le gardien des lieux ; Kim vit dans un petit nid douillet, au milieu de cette solitude d’automne et d’hiver. Son cœur fond à la vue de nos enfants et nous attendrit en retour ; c’est difficile d’imaginer le goût sauvage et dur de la vie dans ces villages au bord du lac et ailleurs plus au nord où il y a encore quelques endroits habités…mais ce sont des endroits grandioses qu’on ne peut pas oublier, ni ceux qui leur donnent une âme. |
Chez Kim |
Kim gardien des bains |
A bientôt Poka |
Nous sommes à trois heures de route d’ Oulan-Oudé ; avec Anatoli et Oleg il faudra compter un peu plus . D’abord, comme à l’aller, les arrêts « chamaniques » : à certains endroits précis (abri, rocher, arbre), il faut s’arrêter et faire une offrande : une piécette, ou du liquide (eau, thé, lait, alcool) que l’on asperge autour de soi pour se prémunir contre les ennuis en voyage…Ce n’est tout simplement pas la peine de discuter sur ce point avec Anatoli et Oleg ; après tout, ces pauses obligatoires permettent de sortir admirer le paysage ou de …soulager une envie pressante ! Si l’on ramasse un caillou, du sable (pour toi Audrey !), là aussi on jette une petite pièce. Ensuite, on s’arrête négocier l’achat de deux beaux poissons chez des « flibustiers », ainsi que les appelle élégamment Oleg ; ce sont des pêcheurs sans permis, et vu l’état de leur maison, leur petit commerce ne dépasse certainement pas les limites du raisonnable. L’arrêt « flibustier » nous a pris encore une demi-heure. Puis, direction le village suivant, Oïmour, car il ne faut pas manquer, paraît-il, d’y acheter du pain, « le meilleur de toute la Bouriatie » et c’est vrai ! Nous dégustons l’excellent pain encore chaud dans le camion, alors qu’il commence à neiger et qu’Anatoli a filé chez le patron de l’usine de pêche ; il en revient en compagnie de l’homme en question, qui nous offre encore et toujours du poisson (omouls salés, frais ou fumés) qui accompagnent parfaitement le pain. Après quelques minutes, il est décidé que nous reviendrons en novembre jouer dans l’école du village. Davaï ! Vient ensuite l’arrêt et l’attente au bac de la Selenga, qui depuis 70 ans faisait traverser les véhicules ; « faisait », car un pont tout neuf est ouvert à la circulation depuis notre passage et nous avons été dans les derniers usagers du bac. Ainsi, il n’y aura plus rien à dire sur ses conducteurs et manœuvres, ses vendeuses de baies et de graines de tournesol, son abri tout rouillé et ses passagers descendus des bus, qui pour quelques minutes se mettaient à rêvasser sur le pont… Comme d’autres citoyens de Bouriatie (et notamment chez les écrivains et hommes de théâtre) Anatoli se préoccupe de l’avenir du lac Baïkal, menacé par la construction d’infra-structures logistiques ou touristiques, et surtout par la présence d’une usine à papier située sur ses berges. Afin de tenter d’enrayer un processus de pollution irréversible de la dernière réserve d’eau potable de notre planète, nous faisons donc un dernier arrêt « écologique » (RV d’Anatoli avec des autorités locales à Briansk) avant de rentrer à Oulan-Oudé. |
Cendrier au pied d'un immeuble |
Dans trois jours le bac s'arrête |
des Flibustiers |
Abrit Chamanique |
Entre Tarbagataï et Oulan Oude |
Lundi dernier (22 octobre) c’est Marina, professeur de français à l’institut des langues étrangères,qui nous accompagne pour la rencontre à l’école n° 52 de la ville, dans le Melkombinat (le « combinat du sable »), quartier pas très riche de la ville . C’est l’une des écoles où le français continue d’être enseigné à raison de deux à trois heures par semaine, de 7 à 17 ans . Les professeurs de français nous accueillent à bras ouverts ainsi que la directrice (elle-même enseignant également le français), et le spectacle que toutes les classes ont préparé à notre intention (saynètes, contes, chansons, poésies, tout en français bien sûr) nous touche beaucoup. Les professeurs de cette école furent les premières étudiantes de Bouriatie diplômées en langue française ; leur passion et les difficultés pour joindre les deux bouts avec des retraites minuscules, les poussent à continuer de travailler au sein de leur établissement. La directrice s’exclame avec toute cette émotion dont les Russes sont capables: « Voilà 40 ans que je suis sortie de l’université , et je comprends tout, absolument tout ce que vous dites ! » Elles ne sont pas enchantées, elles sont aux anges ; cette fête dure pendant deux heures et déjà on essaie de réfléchir à nos prochains rendez-vous (une date sûre en décembre) ; nous voulons revenir jouer pour eux mais aussi leur préparer des livres, des CD ; vous pouvez vous aussi nous aider si vous voulez ! Encore un musée que nous sommes allés voir de notre propre initiative cette fois-ci : le musée ethnographique, dans un grand parc, qui présente des reconstitutions d’habitats traditionnels très intéressantes : quartier « cosaque », quartier « bouriate », tipis des ethnies évenks ou aginsk, en bois et écorces aplaties (les habitants préhistoriques de la région seraient les ancêtres des indiens d’Amérique du nord, une migration ayant peut-être eu lieu passant par la terre ferme à l’emplacement actuel du détroit de Béring) ; la tente du chamane, recouverte de fourrures, et dont le sol est jonché de pièces jetées par les visiteurs, a beaucoup plu aux enfants ;sans nos explications et notre interdiction de toucher,ils n’auraient pas hésité un instant à se remplir les poches ! Seule ombre à la visite : le zoo est rempli d’animaux de Sibérie (loups, renards, félins, cervidés, rapaces, ours) qui tournent désespérément en rond dans leurs cages en général minuscules . |
La directrice et les professeurs de Français |
Biblkiothèque ou musée |
La première neige |
Depuis cette semaine, les sujets de conversation tournent autour de la constitution des réserves pour l’hiver ; aux carrefours, devant les magasins, on vend les choux du jardin. Les petites bicoques (comme en Ukraine, on y vend de tout) sont ouvertes mais il faut frapper à la lucarne pour se faire servir car les propriétaires évitent les courants d’air. Au menu culturellement c’est plus léger que ça, et on espère une mise en route assez prochaine de nos échanges avec différentes structures sur la ville ; en novembre nous devrions jouer pour la prison et pour un centre qui accueille des personnes handicapées. Pour l’instant nous avons trouvé un job les vendredis et samedis soirs , dans un restaurant qui se veut « à l’occidentale », dont le patron est un portrait-type de l’homme d’affaires chinois des séries télévisées américaines ; d’ailleurs le fond de scène n’est autre qu’un immense poster des Twin Towers , collé avant le 11 septembre, ça devait coûter un peu cher de tout remplacer… nous jouons donc, Gérard et moi, devant les Tours, lui en chemise argent, moi ayant trouvé un chemisier imitant parfaitement les cascades de frous-frous des rideaux moirés de la salle ; expérience assez amusante et qui nous permet malgré tout , en nous rapportant un peu d’argent, d’entretenir un tant soit peu le travail. |
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